Cinquante ans de transhumance


J’ai décidé, au début des années 70, de photographier la transhumance à pied des ovins en Provence orientale car il était question à l’époque de l’interdire.
Cinquante ans plus tard, la transhumance à pied est toujours tolérée sans être officiellement permise. Beaucoup moins nombreux qu’autrefois, des troupeaux « font la route » en juin et en octobre dans les départements des Alpes de Haute Provence, des Alpes Maritimes et du Var.
La transhumance est une nécessité car il n’y a plus d’herbe à manger dans le bas pays à l’entrée de l’été alors que sur les alpages elle est abondante.
J’ai fait une vingtaine de fois la transhumance montante, l’amontanhage en provençal, et cinq fois la transhumance descendante, le demontanhage, la première en 1974, la dernière en 2019.
Ma transhumance la plus riche en photographies dignes d’intérêt est celle de juin 1975 qui m’avait permis, en sept jours de marche, de me rendre de Roquebrune sur Argens (83) à la montagne de l’Adrech sur la commune de Beuil, dans le Mercantour (06).
J’étais parti pour 3 jours de marche en compagnie d’Aman et Paul Goujon, Clément et Elie Michel. Après une journée consacrée au tri des bêtes et à rejoindre la ferme de Bartouille, commune de Briançonnet, j’étais reparti le lendemain avant l’aube pour 3 autres jours de marche.
Bartouille était la ferme de Julien et Raymonde Raynaud que j’avais rencontrés à cette occasion et qui étaient devenus mes amis. Nous parlions ensemble provençal. Je dispose d’une dizaine d’heures d’enregistrements de Julien qui avait beaucoup d’humour et une grande connaissance de son métier.
Ma transhumance la plus chère à mon cœur est celle de juin 1984. Mon fils François, 10 ans, avait marché entre Bartouille et la cabane de l’Adrech, notre destination. Pendant les trois premiers jours, il avait fait une partie du trajet dans le fourgon de Raymonde. Mais le dernier jour, li avait marché une dizaine d’heures pour le passage du mont Mounier.Entre 1975 et 1984, Julien avait dû rallonger la marche d’un jour, à cause d’un passage devenu trop dangereux près de Péone.
Julien a pris sa retraite en 1989, puis Bernard et Martine Bellini ont pris la relève. J’ai eu la chance de les accompagner en transhumance, comme sur cette photo en juin 2019. Aujourd’hui leur fils Nans est prêt à prendre la relève !
Chers souvenirs, la transhumance me rendrait intarissable.
André Abbe
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