La famille Bresc faisait appel aux amis. Le terrain qui entoure leur maison n’est pas grand. Mais il faut des bras ! Geneviève Bresc partage avec nous ce souvenir familial. Geneviève est l’ancienne directrice du département des sculptures du musée du Louvre, aujourd’hui à la retraite.

L’automne s’approche, les vignes roussissent, les grappes sont gonflées, c’est le moment de
vendanger. Voici le temps du travail, de l’abondance et de l’amitié dans la vigne de
Maracabre aux limites du terroir de Fayence. Cette vigne est dénommée Martial et se
déploie en terrasses entre des murs de pierres sèches, le long de la draille qui conduisait les
moutons de Roquebrune ou de Fréjus jusqu’à Séranon.
Les Bresc ont soigné leur vigne, l’ont taillée, désherbée et l’ont cernée de fils de fer, ornée ici et
là de bouteille et de chiffons enduits d’émouchine pour écarter les sangliers et les blaireaux,
grands amateurs de raisins. L’odeur et l’apparence ne lui donnent donc pas une allure
exemplaire de grand cru. D’autant que par économie, la vigne se marie à l’amandier, à
l’olivier et aux arbres fruitiers qui vont donner un peu d’ombre aux vendangeurs.
Mais c’est le lieu de la convivialité. Car les Bresc ne vendangent pas seuls. Ils ont battu le
rappel : des couples d’amis les accompagnent. Ils sont venus de Saint-Paul-en-Forêt, les
Martel et les Simon, de Roquebrune, les Abbe, de Saint-Maximin, les Blanchet. Ce sont des
retrouvailles entre de vieux amis, à midi il y aura le civet de lapin (ou l’aioli si c’est vendredi),
arrosé modérément, voire un peu plus.
Chacun-chacune a posé sur sa tête un grand chapeau pour se protéger du soleil ; chacun a
pris son couteau, sa serpette et un panier de vendangeur. Au bout de la rangée de vigne, la
« fiéragno », un homme costaud tient une grande corbeille, le « banastoun ». Les raisins
s’accumulent, des cris retentissent, car on n’a aucune raison de se taire quand il fait beau et
qu’on est ensemble. Il faut se pencher et se relever, couper, porter un panier de plus en plus
lourd, aller et venir jusqu’au « banastoun ». Il fait chaud, on transpire. Au sommet de la
vigne, un puits donne une eau excellente qui rafraîchit. Les mains commencent à faire mal,
le dos courbé devient douloureux, les jambes se raidissent. Vivement la « sousto » !
Demain, la petite compagnie ira se déplacer chez un autre couple pour une autre vendange.
Échanges de paroles et échanges de soutiens amicaux vont ensemble dans une économie
circulaire où plaisir rime avec travail partagé.

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