La Gazette de Passadoc – N° 169

L'hebdo 169

Il  s’appelait  Ernest…

 

– Il s’appelait Ernest…

– Tu veux parler d’Ernest de Martigues ?

– Non… je veux parler d’Ernest Hemingway et de son amour pour notre région… au point de venir y passer sa lune de miel lorsqu’il épouse Pauline Pfeiffer en 1927.

Il séjourne au Grau-du-Roi qui n’est alors qu’un village de pêcheurs. Hemingway connaît déjà le Gard… C’est un aficionado, un habitué des arènes de Nîmes ; il est séduit par les superbes paysages camarguais et se rend à bicyclette aux Saintes-Maries-de-la-Mer pour assister aux pèlerinages.

En décembre 1949, l’écrivain revient passer quelques jours de vacances au Grau-du-Roi. “J’ai toujours aimé ce soin”, écrit-il à son éditeur.

– Peut-être que j’aurais mieux fait de ne pas devenir pêcheur, songea-t-il. Mais qu’est-ce que j’aurais bien pu faire d’autre ? *

Jeanne Monin

*Le Vieil homme et la mer –  E. Hemingway – 1952

  • Les échos de la semaine
    Les forgerons
    La pompe à essence
    L’épicerie ambulante
    L’accent de chez nous !
    Enfant, à quoi jouiez-vous ?

Les forgerons

On a installé la forge dans la cour !
Kling-Klang… Kling-Klang… Musique bien rythmée des marteaux qui s’abattent sur l’enclume…
Tabliers de cuir… et cigarette au bec !

[Photo André Abbe]
Giselle Penat-Laborde
Beaucoup de souvenirs et d’émotion.
 
Je pense reconnaître Gérard Fontvieille (Lou Fourgeiroun), ami de mon frère Guy, et notre bon voisin dans la Rue des Douanes, quand il y avait encore son atelier, avant que ce local ne soit détruit avec celui du menuisier par un incendie, début des années 2000.
 
Accompagné sur la photo, si je ne fais pas erreur, par Bernard Polian, bonne connaissance également de Guy et de la famille.
 
Gérard était natif de Firminy/Saint-Étienne et avait fait “ses armes” à la Manufacture d’Armes de Saint-Étienne.
Je pense souvent à lui et à son épouse Jeannine.
 
Encore plus en écoutant Les mains d’or, la chanson de Bernard Lavilliers, un autre stéphanois, qui a bien connu ce monde des “forges”…  je te la dédie, Gérard, toi qui dois continuer là-haut à jouer l’infatigable Héphaïstos en forgeant l’acier rouge avec tes mains d’or …

Jean-Philippe Tinois
Je suis fasciné par la ferronnerie avec cet aspect mystique du travail du métal par le feu , les légendes des épées magiques, des chevaliers… 

Mais je ne maîtrise pas et me sens bien mieux dans les senteurs et les lignes du bois sa chaleur naturelle au touché.

 Francis Brun me racontait les anecdotes de sa vie de ferronnier avec M. Fontvieille et j’écoutais ébahi par tant de précision dans l’analyse des ambiances de l’époque et la qualité du souvenir. 

Je lui avais demandé si il pouvait m’aider à me faire ma propre épée car il avait gardé un atelier complet avec forge, enclume, marteaux, tabliers de cuir, l’époque où j’étais passionné par les médiévales et il ne s’était pas senti la force de me montrer peut-être pensait-il que ce serait à lui de travailler le fer. 

À la fin de ses jours il m’a avoué avec tristesse qu’il regrettait de ne pas avoir répondu favorablement à ma demande et que ça aurait été une belle aventure à vivre.

Bon j’arrête là, mes yeux me trahissent et ma gorge se noue. Fais ronfler les forges d’Héphaïstos mon Francis, là où tu es .

La pompe à essence...

 André Abbe
 
Anecdote…
Les prix étaient affichés, des automobilistes s’activaient aux pompes, la n°6 se trouvait disponible ; tout semblait aller pour le mieux à la station Esso Express du Muy (Var).
 
Ma carte de paiement, code secret à l’appui, m’avait permis de parvenir aux “000” qui annoncent que le client peut se servir. Joie ! J’allais pouvoir faire le plein. Mais en appuyant sur la gâchette, au lieu de faire couler le précieux gasoil “err…” s’ affichait.
La pompe 6 est elle aussi réservée aux poids lourds, m’a dit le voisin de la pompe 5. C’était écrit nulle part.
 
Ces “000” sur l’écran de la pompe me donnaient du souci. J’imaginais un chauffeur de poids lourd capable de se servir 300 litres sur mon compte en se servant de mon “000”. Consternation. Ce coup foireux semble possible.
 
J’ai décidé de renoncer à essayer de mettre du gasoil dans mon auto au Muy.
À ce moment là, je suis revenu par la pensée 70 ans en arrière, quand les vacanciers de la Nationale 7 ramaient pour arriver à la mer. En ce temps là, la traversée du Muy était le dernier obstacle pour se rendre à Saint-Aygulf et aux Issambres.
 
À Tourves (Var), chaque été, on reconstitue les embouteillages à l’aide des 4cv, des Tractions, des Dyna Panhard, des 203 Peugeot. Après Tourves, il restait Brignoles, le Luc, Vidauban à traverser avant d’arriver au Muy.
 
Un père avait dit à son fils :
Après le Muy, tu seras tiré d’affaire ! Hélas dans la longue queue précédant l’entrée du Muy, l’auto du fils avait été immobilisée à la suite d’ un accrochage.
Le fils avait envoyé une carte postale à son père disant :
Je n’ai pas dépassé le Muy…
 
Dépasser le Muy, 70 ans plus tard, peut toujours s’avérer compliqué !…
 
[Photo André Abbe]

 

Au classement “Les dix côtes les plus célèbres de France”, la côte d’Azur est classée à la première place. De Cassis, jusqu’à la frontière italienne au niveau de la ville de Menton, son climat doux et ensoleillé en fait une des destinations appréciées par les touristes attirés par Nice, Cannes, Antibes et Saint-Tropez.

Trop souvent, ils oublient les calanques de Cassis, le massif de l’Estérel et une côte magnifique à découvrir sur terre ou par la mer et l’arrière pays préservé des constructions bétonnées

Vidéo proposée par Claude Boyer.

L'épicerie ambulante

L’estafette s’annonçait à grand renfort de coups de klaxon … et les clients venaient faire leurs emplettes.
On était loin des exigences d’aujourd’hui… point de vitrines réfrigérées, sans doute point de date “à consommer au plus tard”…
Internet était encore un mot inconnu ; quant à l’IA, même pas en rêve !

À Brousse-le-Château en Aveyron (1987) – Photo André Abbe.

Ediem Carp
– Le nôtre s’appelait Toto, il passait dans le hameau tous les samedis. C’était le bon temps où les familles étaient réunies … c’était un autre temps.
 

Chantal Bain Taxil
– Nous avions Monsieur Alberti qui passait le vendredi soir à Saint Bayon dans les années 60…

 

Dañiel Oliver
Se fa encara dins mant’un vilajon ! [C’est encore fait au village !]

 
Jean-Jacque Murat
– Me sembla qu’èra puslèu un master que cornava [Il me semble que c’était plutôt un Master qui klaxonnait …]
 
René Daniel Taxil
Ce n’est pas une estafette sur la photo mais un fourgon Peugeot J7 ou J9 ; il faisait les tournées de village en village.
 

L'accent de chez nous !

André Abbe :
Quand les Gascons étaient pris pour des …
Il y a 300 ans déjà, Marivaux mettait en scène un personnage ridicule et prétentieux dans L’heureux stratagème, le chevalier gascon.
Lors d’une diffusion à la télévision, le metteur en scène en avait ajouté une couche en le faisant parler avec un accent outrancier, à mi-chemin entre l’accent dit du Midi et l’accent corse. Notre accent moqué au théâtre, ça ne date pas d’hier.
 
J’en profite pour envoyer un amical bonjour aux gascons avec lesquels j’avais manifesté à Carcassonne en 2005, pour la défense et la promotion des langues régionales…
[Photo André Abbe]

Giselle Penat-Laborde
Comment ne pas penser à cette chanson de Fernandel ?

De l’accent, de l’accent, mais, après tout, en ai-je
Pourquoi cette faveur, pourquoi ce privilège
Et si je vous disais après tout, genses du Nord
Que c’est vous qui, pour nous, semblez l’avoir très fort
Que nous disions de vous, du Rhône à la Gironde
“Ces gens-là n’ont pas le parler de tout le monde”
Et que, tout dépendant de la façon de voir
Ne pas avoir d’accent, pour nous, c’est en avoir

Enfant, à quoi jouiez-vous ?

François Abbe
 
Ce jour-là, mon père André s’occupe de la vigne. Et nous, on s’amuse à prendre des photos. Aujourd’hui on dirait : un shooting photo. 
Le modèle, c’est Lise Henriot ma voisine et amie. Elle fait partie des quatre voisins de la placette Mayol à Roquebrune. J’en parle dans un nouvel article dont je suis très fier. Lise et Kakou pour les contributions !!!
[Photo : André Abbe]
 

Momo dela Etdici

L’été on jouait beaucoup autour des fontaines qui à l’époque coulaient. Je me souviens particulièrement d’une fois où les garçons c’étaient joints à nous les filles pour jouer à la dinette autour de la fontaine de la Pompe à Lorgues… Ce qui nous avait étonné d’ailleurs.
 
Nous avions décidé de ramener chacun et chacune un peu de vraie nourriture de la maison pour faire une dinette en vrai avec un vrai repas que nous devrions manger… mal nous en a pris d’inviter les garçons qui avaient prévu le coup car il était convenu que nous goûterions à tout. C’est la première fois que je croquais un piment (qu’ils ont fait passer pour une sorte de poivron)… heureusement que l’eau de la fontaine coulait je crois que je n’en ai jamais autant bu. Sinon avec ma fratrie dont j’étais la cagueniou (je ne sais pas bien l’écrire) et les copains et copines des rues, nous n’avions pas grand chose à l’époque les activités pour enfants comme il y a maintenant n’existaient pas ou celles qui existaient étaient bien au-delà des moyens de nos familles. 
 
Chaque année, avec les plus grands on organisait un spectacle que tous les voisins venaient voir dans une grande impasse. On récupérait à la décharge du village et transformait vêtements et objets pour nos pièces de théâtre (recyclage avant l’heure). Les plus doués faisaient des acrobaties, un de mes frères en faisait partie : il faisait un peu comme au cirque avec des animaux mais là c’était avec le chien qu’il avait bien dressé. 
 
On mettait la musique avec un petit tourne disques à piles pour le spectacle de danse et plein d’autres choses. En plus on vendait de la boisson faite avec le célèbre “coco” et nous faisions aussi une tombola où il y avait peu de gagnants au final car les grands se débrouillaient pour ne mettre que peu de numéros gagnants et pour de petits lots seulement… Heureusement d’ailleurs car mon frère avait eu la lumineuse idée de mettre en gros lot quelques poules du poulailler, ce qui avait mis en rage notre père lorsqu’il s’en est aperçu !
 
De l’imagination, on en manquait pas et ce petit spectacle – qui occupait bien nos jours sans école – s’est fait plusieurs années de suite avec un nombreux public qui appréciait. Adulte je suis retournée plusieurs fois dans l’impasse où on donnait le spectacle. Maintenant en lieu et place des remises et du poulailler il y a de jolies façades de coquettes maisons mais pendant longtemps, sur la porte d’une des remises, était resté écrit en jolies lettres et petits dessins autour “théâtre” qui me faisait revenir à cette période de mon enfance qui reste gravée dans mon cœur et ma mémoire.
 
 

Jean-Philippe Tinois

Moi aussi… activités simples aussi pour le jeu laissant une grande part à l’imagination, toujours un peu belliqueuse tout de même : construire arcs, flèches normales et polynésiennes, attaquer des ennemis imaginaires à la grenade (grosses piles), sauver des princesses, beaucoup de princesses. 
 
Aller embêter les épinoches, petits poissons du coin, descendre la rue en pente avec comme véhicule une vieille tondeuse à gazon pour le passager et les patins à roulettes pour le conducteur. Les pétards à mèches aussi…  Ah ! ça, c’était le top ! Envoyer des flèches en l’air dans le champs et courir dans tous les sens en priant qu’elles nous retombent pas sur la tête car les flèches étaient plombées bien sûr avec un peu de fil à souder autour de la pointe volé dans l’atelier du Papa…
 
De la chimie aussi des essais de distillation de parfum et alcool trèèèès dangereux. Des fusées en aluminium avec comme combustible des têtes grattées d’allumettes … J’avais une imagination qui m’a valu quelques bonnes tartes de ma mère qui en avait marre d’aller me rechercher aux urgences ou d’aller s’excuser auprès des voisins !
 
 

Claude Boyer
On jouait à plein de choses avec pas grand chose… Pas difficile, on n’avait pas d’envies vu qu’il n’y avait rien qui pouvait exciter notre convoitise.

On allait frapper à la porte des copains et on courait les bois, on jouait aux billes, on tapait dans un ballon, on s’inventait des mondes où on était Zorro ou Batman… Il n’était pas rare de voir un genou ou un coude badigeonné de Mercurochrome… Enfin, je parle pour les garçons car à l’époque les filles ne nous intéressaient pas, on les laissait à leur poupée et leur dinette !
 
    • Sont cités dans La Gazette :
      André Abbe
      François Abbe
      Claude Boyer
      Edien Carp
      Momo dela Etdici
      Jeanne Monin
      Jean-Jacques Murat
      Daniel Olivier
      Giselle Penat-Laborde
      Chantal Bain Taxil
      René Daniel Taxil
      Jean-Philippe Tinois


    • Rédactrice en chef
      Jeanne Monin

Passadoc