La Gazette de Passadoc – N° 157

L'hebdo 157

Les mots aussi voyagent…

Comme les hommes, les mots aussi voyagent.

Exemple : fada*.
Venu du latin fatuus (insensé), il s’arrête en Provence dès 1343 et s’il reste régional, il est connu dans toute la France, grâce notamment à Marcel Pagnol** :

C’est pourquoi, lorsqu’il se présente une bonne action, toute prête, en état de marche, juste devant votre nez, c’est que le Bon Dieu vous l’offre. Celui qui ne saute pas sur le marchepied et qui s’en va les mains dans les poches, c’est un pauvre fada qui a manqué le train“.

Autre exemple ?
1870 : venus de Bretagne, les soldats réclament bara (pain) et gwin (vin) à leurs officiers qui ne comprennent rien à ce langage. La guerre terminée, les militaires regagnent leur province… mais baragouiner*** reste dans les villes et les villages !

Mais comment les homosapiens, nomades chasseurs/cueilleurs, s’exprimaient-ils ? Les scientifiques sont assez d’accord pour dire que les échanges n’étaient que gestes, cris, sifflements et mimiques expressives et que les langues ne se formèrent que lors de la sédentarisation.

Pour développer le sujet, il faudrait des heures et des heures de recherches, des pages et des pages de gazette… on n’est pas assez fadas pour ça !

Jeanne Monin

Recherches sur plusieurs sites.

*     Au-delà de l’origine latine, “fada” veut dire envouté par les fées. Il existe le féminin “fadade” en français populaire.
       Trouvé dans le Tresor dóu Felibrige : parlo coume uno fado : elle a un langage enchanteur.
**   Manon des Sources.
*** Belle histoire… mais on trouve barragouin dès 1532 avec la même hypothèse : réunion de pain et de vin. L’expression est reprise par Rabelais qui lui donne le sens de “personne parlant un langage incompréhensible” – Source Alain Rey – Dictionnaire Historique de la Langue Française

  • Les échos de la semaine
    Les tripettes de Barjols
    Le vieil arbre
    Siès un peis !


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Les Tripettes de Barjols


Un moment de réjouissance pour les 3 000 habitants de cette commune du Var.
Ouvrez vite cette page ! Claude Boyer raconte

Le vieil arbre

En balade dans le Cantal, j’avais photographié cet arbre majestueux qui m’avait fait immédiatement penser à L’Aubre Vielh (Le vieil arbre) de Marcèla Delpastre, œuvre poétique majeure du XXe siècle en langue occitane.

Poétesse et paysanne, Marcèla est née à Germont (Corrèze) en 1925. Elle est morte dans sa ferme en 1998, il y a tout juste 25 ans.
 
J’encourage les Passadociens amateurs de poésie à lire Marcelle Delpastre en occitan et/ou en français.
 
André Abbe
 
Extraits :
L’aubre vielh, que diriatz que jamai lai tornarà montar la saba, talament la ruscha
es crebada, la raiç curada de vermes que tomba en pouvera per lo mitan, jamai,
vengut l’estiu, n’aviá balhat tant de fuelhas, ni de flors tan perfumadas, e nos en
sovendrem de sa frucha mai de son ombra.
Per lo tuar, queu país, tant que parla sa lenga en flors de l’aubre vielh, non n’es pas
naissut lo chaçado.
 
“L’arbre vieux, tel qu’on dirait que jamais n’y remontera la sève, tant l’écorce semble
morte, la racine mangée de vers, et qui tombe en poussière par le milieu, jamais,
venu l’été, il n’avait donné tant de feuilles, ni des fleurs si parfumées. Et nous nous
en souviendrons, de ses fruits et de son ombre.
Pour le tuer, ce pays, tant qu’il parle sa langue en fleurs de l’arbre vieux, non il n’est
 
 
Claude Boyer
Quand j’étais gamin, nous allions souvent en Italie dans le Piémont ; mes parents qui ne parlaient pas l’italien s’en sortaient bien en parlant provençal.
 
 
Photo André Abbe

Siès un peis !

Ce n’est pas la première fois que quelqu’un me demande pourquoi, en Provence, nous disons “Siès un peis” (Tu es un poisson !) à une personne qui a réussi un beau coup.

En français – dans ces circonstances – on dira “Tu es un as” ou “Tu es un champion”.
Je crois avoir l’explication mais je ne peux pas être formel. Si vous en savez plus que moi, dites-le nous.
 
Les poissons (pas tous) ont la capacité de remonter les courants sans zigzaguer, de franchir les cascades, ce qui faisait l’admiration de nos anciens. D’où ce “siès un peis”.
 
Le secrétaire du marquis de Saluces (Saluzzo en italien- province de Cuneo) Frédéric II, avait pour devise “Droit quoi qu’il soit” et pour emblème un poisson. Ça apporte de l’eau à mon moulin !
 
André Abbe.
Photo A. Abbe : marché au poisson et herbes aromatiques sur le Vieux Port de Marseille dans les années 80.

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  • Sont cités dans La Gazette :
    André Abbe
    Claude Boyer
    Jeanne Monin

  • Rédactrice en chef
    Jeanne Monin

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