Un film de légende
Lorsqu’on parle cinéma en Passadoc, on pense aussitôt à Marcel Pagnol, Raimu, Manon des Sources, Jean de Florette, M. Brun et son Pitalugue, Cannes et son festival ou les studios de la Victorine à Nice.
Cependant il est un film qui ne doit rien à tout ça, ce qui n’a pas empêché sa célébrité de traverser les décennies.

Qui n’a jamais vu et revu Le Salaire de la peur, sorti en 1953, réalisé par Henri-Georges Clouzot d’après une adaptation du roman de Georges Arnaud ? Il a remporté la même année la Palme d’or du Festival de Cannes et l’Ours d’or au Festival de Berlin, chose rare dans l’histoire du cinéma. Henri-Georges Clouzot désirait le réaliser au Guatemala mais Montand ayant fait juste avant un voyage en Amérique centrale refusa de tourner dans cette partie du monde trouvant cela indécent. Clouzot lui proposa l’Espagne, ce qu’il refusa par dégout du régime franquiste.
On a des convictions ou on n’en a pas !
Le réalisateur céda et c’est ainsi que le film fut intégralement tourné en Passadoc…Le 7e régiment du génie d’Avignon a même été sollicité pour le transport du matériel, opération au cours de laquelle dès la première semaine, deux militaires se noient, puis, l’actrice Vera Clouzot, la femme du réalisateur, tombe gravement malade et le tournage ne peut reprendre qu’après plusieurs semaines. Lorsqu’il reprend, un déluge de pluie et de vent détruit les décors. ” Je n’ai jamais vu tant de problèmes sur un film“, confiait Yves Montand
Les différents lieux de tournage sont :
-L’ancien camp de Saliers sur la commune d’Arles.
-La bambouseraie d’Anduze, pour le tournage de nuit où le camion roule sur la piste en « tôle ondulée ».
-En Camargue où des puits et des derricks ont été construits pour le film
– La rive gauche du Gardon pour le lieu de l’explosion du premier camion qui oblige Montand à traverser une mare de pétrole où Vanel aura la jambe écrasée par un tronc d’arbre. En 2002, la grande crue du Gardon a remis à jour cet endroit, entre l’ancien Hôtel et la source de la Canelle ; en effet, depuis des décennies, trois mètres de sable, d’alluvions et de végétation le recouvraient.
-Les virages de la D 979, traversant le camp des Garrigues entre Nîmes et Uzès, pour la scène finale où Yves Montand zigzague au volant de son camion.
-La route de la Baume (ancienne D 127) en limite du village de Poulx pour la scène où le camion d’Yves Montand tombe dans le ravin.
Les débris de celui-ci gisaient au fond de la combe jusqu’en 1990. Châssis, plateau et ridelles ainsi que la cabine, retournée, sur la portière de laquelle on pouvait encore lire le logo de la compagnie pétrolière SOC, inventée pour le film. On effectua un nettoyage de la combe pour enlever la carcasse : un hélicoptère hélitreuilla les débris préalablement découpés au chalumeau et à la disqueuse. Comme quoi nul besoin d’industrie hollywoodienne pour réaliser un chef d’œuvre qui fait date dans l’histoire du cinéma.
Claude Boyer
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